quote: | La Corée du Sud découvre la dépendance au jeu en ligne
SEOUL - Dans le monde du jeu en ligne sud-coréen "Lineage", Lim est un héros riche et célèbre d'un monde où une épée étincelante et un sort opportunément lancé l'assurent de rester en vie.
Dans le monde réel, Lim est un garçon de 12 ans poursuivi par la police pour avoir volé 16.000 dollars à son père et s'être enfui de chez lui pour pouvoir jouer tout son soûl.
"Le garçon nous a dit vouloir jouer de tout son coeur, alors il a décidé de quitter la maison", a expliqué le policier Jung Sang-won, qui a recherché et retrouvé Lim le mois dernier à Pusan, la grande ville portuaire du sud du pays.
Le jeune garçon a été retrouvé quand il a voulu encaisser dans une banque quelques chèques émis par son père et transférer l'équivalent de 300 dollars à un camarade de jeu en échange d'objets virtuels du jeu "Lineage".
Le cas de Lim illustre un des problèmes sociaux émergents en Corée du Sud avec le développement des réseaux d'accès à internet à haut débit et du marché du jeu vidéo en ligne, aujourd'hui estimé à près de 500 milliards de wons par an, soit 420 millions de dollars.
Certains joueurs peuvent gagner de fortes sommes d'argent en faisant collecter par leur personnage des objets virtuels, tels des potions magiques ou des armes enchantées, dans les jeux de rôles multi-joueurs pour les revendre à d'autres joueurs contre de l'argent bien réel.
PHENOMENE SOCIAL ET VECTEUR DE CROISSANCE ECONOMIQUE
Environ 70% des 48 millions de Sud-Coréens ont accès à internet et 11 millions bénéficient d'une connexion haut débit, soit le plus fort taux de pénétration au monde sur cette technologie.
L'éditeur NCsoft, qui a produit "Lineage", a produit un chiffre d'affaires d'environ 111 milliards de wons sur les neuf premiers mois de l'année 2003, avec 22 milliards de bénéfice net.
Son concurrent local Webzen a dégagé un bénéfice net de 25,3 milliards de wons pour un chiffre d'affaires de 42,2 milliards tout en levant 97 millions de dollars par la vente d'actions aux Etats-Unis en décembre dans le cadre d'une stratégie d'expansion à l'étranger.
L'explosion du jeu en ligne a entraîné l'apparition de chaînes télévisées sur le câble diffusant 24 heures par jour des compétitions de joueurs professionnels et la création de "fan clubs" pour ces derniers qui attirent des dizaines de milliers de membres.
"Je passe habituellement dix heures par jour devant un ordinateur pour préparer des concours et étudier des stratégies pour gagner", explique une joueuse professionnelle, Kim Ka-eul, 25 ans, qui dirige une équipe de 19 joueurs. Elle gagne sa vie grâce à des partenariats avec des entreprises et aux prix remportés.
"Certains joueurs professionnels n'ont que 13 ans et il y a plus de 50 pros qui apparaissent régulièrement sur les chaînes de jeux vidéo", ajoute-t-elle. "Une superstar possède même un fan-club avec plus de 100.000 membres".
Quelques sociologues ont exprimé leur préoccupation devant la place que peut prendre le jeu vidéo dans la vie des jeunes Sud-Coréens.
Un sondage commandé par la Commission de protection de la jeunesse a montré que 60% des 1.440 jeunes interrogés estimaient être dépendants des jeux vidéo et d'internet.
"Un chômeur de 25 ans a raconté avoir veillé pendant trois nuits d'affilée afin de remporter des objets virtuels pour les revendre à d'autres joueurs contre de l'argent", a expliqué dans un rapport de recherche Hwang Jang-min de l'université Yonsei. L'homme a ainsi gagné près de 1.400 dollars.
PAS DE REGLEMENTATION ATTENDUE
Les joueurs fanatiques passent entre 17 et 26 heures par semaine à jouer dans des mondes persistants qui incitent à rester sans interruption devant son écran, sans même prendre le temps d'aller aux toilettes ou de manger.
Dans les cas extrêmes, des "accros" au jeu se sont évanouis ou sont morts après des heures de jeu passées à consommer des sodas et des nouilles. Les médias sud-coréens ont répertorié six morts liées aux jeux vidéo en ligne depuis fin 2002, dont un joueur qui a tué sa soeur en confondant monde réel et monde virtuel.
"Dans la plupart des cas, les joueurs fanatiques souffrent des mêmes problèmes: échec scolaire, problèmes relationnels avec leurs amis, leurs familles et leurs enseignants, voire absentéisme scolaire", explique Lee Su-jin, un conseiller du centre pour le conseil et la prévention de la dépendance à internet, créé par le gouvernement en avril 2002.
"Nous recevons des rapports sur environ 30 nouveaux cas par semaine, mais les chiffres sont en augmentation. Les parents ne commencent que maintenant à prendre conscience de la gravité du problème", ajoute-t-il.
Avec plus de 16 millions de foyers connectés à des réseaux haut débit et quelque 25.000 cybercafés dans le pays disposant d'accès haut débit à bas prix, imposer un régime sec aux joueurs relève de la gageure.
Quelques associations professionnelles du jeu vidéo ont incité les éditeurs et distributeurs à promouvoir une autorégulation. Il est en effet peu probable que le gouvernement prenne le risque de limiter une industrie de 500 milliards de wons.
"Ni les éditeurs de jeux, ni le gouvernement ne sont vraiment préparés à régler le problème une fois pour toutes, étant donné leur relativement faible expérience de quelques années sur le secteur du jeu en ligne", affirme Lee Wang-sang, un analyste de LG Investment & Securities. /FL
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l'hallu, y a t il parmi vous des fanas de jeu en ligne ?
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